SIHH 2017 : Day 5 – Indépendables indépendants: Dessine-moi le futur
Au cœur du tumulte du SIHH, entre présentations tonitruantes et stands ultra scénarisés, un petit carré d’irréductibles indépendants fait front pour prouver que le métier est un art pluriel…
Par Vincent Daveau
Contributeur
Le monde horloger durant le SIHH se partage en deux avec, d’un côté plutôt les grandes maisons poids lourds capables de générer des millions de chiffres d’affaire et, de l’autre, une nébuleuse de petits indépendants dont la production annuelle excède rarement le millier de pièces. Ils sont treize, organisés autour d’un atrium central au cœur duquel une sorte de bar permet de faire s’agréger les passionnés pour des échanges hauts en couleurs autour d’un verre.
Créer pour avoir le droit de jouer
Evidemment, les amateurs non spécialisés ne connaissent pas toujours ces horlogers pourtant, installés dans ce nouvel espace scénique situé un peu en retrait de l’entrée principale, ils attendent la visite des professionnels de la communication, les meilleurs acheteurs, mais également ce vendredi, le passage de près de deux mille visiteurs préenregistrés partis à la découverte « in vivo » du meilleur des montres de haute horlogerie. Dans ce lieu, les puristes touchent du doigt la pure créativité et peuvent même rentrer en contact avec les créateurs. Accessibles et passionnés, ils sont, pour la plupart, plus disponibles que les grands patrons des grandes structures et souvent plus à même de décrire le parcours qui les a amenés à produire, avec des moyens parfois relativement légers, des montres originales et souvent complexes.
Refonder les paradigmes classiques
Dans cette petite arène carrée, chaque maison possède une identité qui lui est propre. Les amateurs de produits horlogers ayant des designs contemporains et dont le mode d’affichage original échappe à tout classicisme, trouveront leur bonheur auprès de la maison Urwerk qui, depuis maintenant 20 ans, met tout en œuvre pour proposer des instruments défiant l’entendement en matière de lecture horaire. Cette année, la maison fondée par Felix Baumgartner et Martin Frei célèbre la femme, une vraie première même si, on le sait très bien, un certain nombre d’entre-elles s’étaient déjà emparées de pièces emblématiques pour parer leurs poignets de garde-temps à forte personnalité.
Combat des chefs
Mais, au fil des ans, la concurrence s’est lentement organisée. Et, depuis l’aube des années 2000, des équipes ont commencé de rivaliser avec cette entité visionnaire dans le secteur des montres futuristes ayant choisi de revisiter le mode de lecture horaire classique. La maison Hautlence a été la première à dématérialiser les aiguilles et faire sauter les heures avec une modernité déconcertante. La dernière Vortex Bronze s’inscrit parfaitement dans cette lignée de pièces ayant la magie de rythmer le temps autrement.
La maison MB&F, fondée par Maximilian Büsser -le créateur en son temps de la ligne Opus chez Harry Winston-, a toujours su recomposer l’heure pour l’inscrire dans une dimension émotionnelle unique en son genre. L’Horological Machine N°8 Can-Am est, à sa façon, l’incarnation la plus manifeste de la capacité de ses « amis », de donner une matérialité à ses visions. La toute jeune maison HYT, spécialiste unique dans l’art de dompter les fluides pour leur faire afficher l’heure, impressionne avec la H3 Iceberg. Et que dire de MCT –la Manufacture Contemporaine du Temps- dont les créations magistrales de technicité comme la Sequential Two S210 ou la S110 Vantablack défragmentent le temps pour lui donner une nouvelle réalité.
Ecrire de nouveaux codes graphiques
D’une certaine façon, la refonte de l’affichage de l’heure est la discipline dans laquelle les horlogers de nouvelle génération peuvent donner le mieux libre cours à leur imagination. Cela n’a pas échappé au SIHH qui a choisi de retenir la candidature de Ressence, une jeune maison dont la qualité première est d’avoir, elle aussi, repensé le mode d’indication du temps qui s’écoule. Déconcertante et attachante, cette entité propose une nouvelle expérience horlogère qui se veut plus intuitive et à la fois plus ludique. Sa volonté de renaître à l’essentiel –la racine du nom de la marque- annonce la couleur : donner à l’heure une nouvelle identité graphique, avant tout capable d’échapper à toute convention.
Connaître ses Classiques
Evidemment, d’autres magnifiques marques indépendantes présentent également des nouveautés. On pense à Christophe Claret dont les œuvres visionnaires sont un appel à considérer les montres comme un objet ludique donnant l’heure. Les adeptes des produits décalés pourront se pencher sur les garde-temps de Romain Jerome tandis que les plus sages appréciant un zeste de fantaisie retiendront les créations de Grönefeld, H. Moser & Cie, Speake Marin ou Voutilainen. Toutes à leur façon donnent une nouvelle vision du métier horloger.
Assurément, toutes ces maisons réunies depuis l’an passé sous la bannière du carré des horlogers sont une chance pour le métier. En ayant la faculté de faire découvrir aux amateurs que le temps est pluriel, elles démontrent également combien la diversité est une richesse. Mais leur présence, grâce à la pluralité des approches sensitives, permet avant tout de ré-enchanter le métier qui, ces derniers temps, a bien besoin d’un petit coup de pouce pour changer de cycle et redémarrer…
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